5 juillet 2008





Autour de l’ultimatum : surinformation et désinformation
5/7/2008 - dici.org
On trouvera ici une brève revue de presse des dépêches et articles parus sur l’ultimatum du cardinal Castrillón Hoyos. Ces textes rédigés souvent à la hâte se complètent et se contredisent. Pour un lecteur qui aurait voulu suivre l’actualité « en temps réel », il était impossible de s’y retrouver. Afin de ne pas ajouter à cette confusion, nous ne mentionnons pas les commentaires innombrables qui, de blog en forum, réagissaient immédiatement à ces dépêches ou rebondissaient instantanément sur ces articles.
Quelles sont les conditions posées par le cardinal Castrillón Hoyos ?
 L’Agence France Presse annonçait à ce sujet, le 23 juin :
 « Des tractations sont en cours entre le Vatican et la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, fondée par l’évêque schismatique Marcel Lefebvre, pour mettre fin à une brouille vieille de vingt ans, affirme lundi (23 juin, ndlr) le quotidien italien Il Giornale.
« Selon ce journal, l’actuel supérieur de la Fraternité Mgr Bernard Fellay a récemment rencontré au Vatican le cardinal Dario Castrillón Hoyos, président de la Commission ad-hoc "Ecclesia Dei", qui lui a remis une lettre posant cinq conditions au retour du mouvement intégriste dans "la pleine communion" de l’Eglise.
« Les Lefebvristes doivent donner leur réponse d’ici le 28 juin, assure Il Giornale.
« Comme par le passé, les conditions posées par le Vatican seraient notamment l’acceptation par le mouvement intégriste des enseignements du concile Vatican II (liberté religieuse, œcuménisme) et de la réforme liturgique qui a suivi. »
Mais le lendemain, 24 juin, l’AFP devait rectifier :
« Le Vatican a renoncé à exiger de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X la reconnaissance du concile Vatican II pour passer l’éponge sur le schisme provoqué il y a vingt ans par ce mouvement catholique intégriste fondé par Mgr Lefebvre, selon un vaticaniste italien.
Les cinq conditions posées dans une lettre du Vatican aux Lefebvristes concerneraient la reconnaissance de l’autorité du pape et l’engagement à ne rien dire contre l’Eglise, mais ne feraient aucune allusion au concile Vatican II, a assuré mardi le vaticaniste de Il Giornale, Andrea Tornielli, sur son blog (http://blog.ilgiornale.it/tornielli).
« Jusqu’à présent le Vatican exigeait la reconnaissance des enseignements du concile Vatican II (liberté religieuse, œcuménisme) et de la réforme liturgique qui a suivi pour lever l’excommunication qui a frappé en 1988 les adeptes de Mgr Marcel Lefebvre.
« Andrea Tornielli avait révélé lundi des tractations en cours entre le Vatican et le supérieur de la Fraternité Saint-Pie X, Mgr Bernard Fellay. Il assurait cependant que les conditions posées par le Vatican, et toujours refusées par les Lefebvristes, restaient inchangées.
« Mais mardi le journaliste, généralement bien informé sur les milieux intégristes, indique avoir pu prendre connaissance de la lettre qui ne fait aucune mention explicite ni de Vatican II, ni de la nouvelle liturgie.
Le 25 juin, l’agence I.MEDIA, partenaire à Rome de l’APIC, donnait les cinq conditions, en précisant avoir eu une copie de la lettre du cardinal Castrillón Hoyos à Mgr Fellay, en date du 4 juin, tout comme le vaticaniste Andrea Tornielli l’avouait sans ambages sur son blog, cité par l’AFP. Un spécialiste français des questions religieuses confiait à DICI que, selon lui, la commission Ecclesia Dei cherchait ainsi à mettre la Fraternité Saint-Pie X au pied du mur.
Les conditions de l’ultimatum comprennent-elles implicitement l’acceptation du concile Vatican II et de la messe de Paul VI ?
La Croix du 25 juin a interrogé sur ce point le Père Lombardi, porte-parole du Vatican :
« Contrairement aux accords proposés précédemment par l’Église catholique, celui-ci ne cite pas explicitement Vatican II. Cela veut-il dire que Benoît XVI, passionnément attaché à éviter que le schisme ne devienne définitif, renoncerait à faire de la reconnaissance du concile la condition d’un accord ?
« ‘La reconnaissance du concile Vatican II comme véritable concile œcuménique de l’Église et la reconnaissance de la validité de la Messe célébrée selon la liturgie rénovée après le concile ne sont absolument pas remis en question’, déclare à La Croix le P. Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège.
« Pour lui, les cinq conditions citées, sont ‘les conditions minimales pour qu’il puisse y avoir un rapport caractérisé par le respect et la disponibilité à l’égard du Saint-Père’. ‘Il faut que cette offre, cette “main tendue”, soit reçue avec une attitude et un esprit de charité et de communion’, ajoute-t-il. »
Et le journaliste de La Croix, Nicolas Senèze, explique que le cardinal Castrillón Hoyos emploie là un moyen détourné pour parvenir à un accord :
 « En fait, depuis plus de 20 ans, Rome et Écône sont d’accord pour reconnaître le concile « à la lumière de la Tradition de l’Église ». Les intégristes en profitaient alors pour opérer un tri sévère dans les textes conciliaires, pour en exclure tout ce qui, à leur avis, était contraire à la Tradition. Le cardinal Castrillón Hoyos prend donc une autre voie en demandant aux lefebvristes d’agir « dans le respect de l’autorité » du pape, et de ne pas prétendre à un magistère supérieur au sien. En clair, Rome leur demande d’obéir au pape et à son magistère (qui intègre les décisions du concile) ».
Mgr Fellay a-t-il répondu ou pas ?
 Une dépêche de l’AFP du 27 juin annonçait : « ‘La Fraternité n’a pas l’intention de répondre à cet ultimatum’, a déclaré à l’AFP l’abbé Alain Lorans, porte-parole de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, joint par téléphone à Ecône (Suisse) », pour ajouter quelques lignes plus loin : « Selon l’abbé Lorans, le supérieur général de la Fraternité, Mgr Fellay aurait répondu jeudi (le 26, ndlr) une lettre aux autorités vaticanes ».
 Néanmoins, Le Figaro du 30 juin n’hésitait pas à écrire péremptoirement : « C’est non. Mgr Bernard Fellay, supérieur de la fraternité schismatique Saint-Pie X, et chef des catholiques intégristes, a rejeté la main tendue la semaine dernière par le Vatican pour réintégrer les rangs de l’Église. Si sa réponse officielle n’a pas encore été publiée, elle ne fait aucun doute, les fidèles de Mgr Marcel Lefebvre ne veulent pas, vingt ans après leur excommunication, de l’occasion historique que leur a offerte Benoît XVI de se réconcilier définitivement avec le Saint-Siège ».
On admirera l’assurance de la formule ‘si sa réponse officielle n’a pas encore été publiée, elle ne fait aucun doute’. Nul doute aussi que le métier de journaliste ne soit difficile, mais mieux vaut quand même s’en tenir aux faits avérés et aux documents publiés.
date : 5/7/2008