25 février 2001

Ecclesia Dei:Quatre nominations - Une base de dialogue élargi avec la Fraternité Saint Pie X
25 février 2001 (ZENIT.org)
CITÉ DU VATICAN, Dimanche 25 février 2001 (ZENIT.org) - Le pape Jean-Paul II a nommé quatre nouveaux membres de la commission "Ecclesia Dei" qu'il a instituée en 1988. Ces nominations assureront une base de dialogue élargie avec la Fraternité Saint Pie X, qui a eu ces derniers mois des contacts répétés avec le cardinal Dario Castrillon Hoyos, préfet de la congrégation pour le clergé et président de la commission. D'aucuns y voient un signe que le dialogue a été renoué de façon visible à la faveur du Grand Jubilé. Elles surviennent aussi au lendemain du consistoire et de la fête de la Chaire de Saint-Pierre qui a donné à Jean-Paul II l'occasion d'insister sur le ministère d'unité du Successeur de Pierre et de demander aux nouveaux cardinaux de l'aider spécifiquement dans cette tâche.

Les nominations

Les quatre nouveaux membres sont le cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi, Jorge Medina Estévez, préfet de la congrégation pour le Culte divin et la discipline des sacrements, Louis-Marie Billé, archevêque de Lyon et président de la conférence épiscopale française, ainsi que Mgr Juliàn Herranz, président du conseil pontifical pour les Textes législatifs.
La nomination du cardinal Ratzinger assure - entre autres - la transmission de la mémoire des négociations et des événements qui ont précédé et conduit à Ecclesia Dei. La nomination du cardinal Medina se comprend aussi par l'importance de la question liturgique et de la pastorale des sacrements, celle de Mgr Herranz souligne l'aspect juridique de la question. Et la nomination du cardinal Billé, comme le relèvent des observateurs autorisés à Rome, est particulièrement importante dans ce processus de dialogue qui concerne particulièrement l'Église en France.

La Lettre apostolique "Ecclesia Dei"

Dans la Lettre apostolique "Ecclesia Dei adflicta", en forme de Motu Proprio et en date du 2 juillet 1988, on lit (nous traduisons de l'italien): "compte tenu de l'importance et de la complexité des problèmes mentionnés dans ce document", Jean-Paul II a institué cette commission (ce passage de la Lettre est repris par l'Annuaire pontifical) "avec pour tâche de collaborer avec les évêques, avec les dicastères de la curie romaine et avec les milieux intéressés, dans le but de faciliter la pleine communion ecclésiale des prêtres, des séminaristes, communautés ou religieux et religieuses jusqu'ici liés de différentes façons à la Fraternité fondée par Mgr Marcel Lefèbvre (mort en 1991, ndlr), qui désirent rester unis au Successeur de Pierre dans l'Église catholique en conservant leurs traditions spirituelles et liturgiques". Et ceci à la lumière du protocole signé le 5 mai précédent par le cardinal Ratzinger et Mgr Lefèbvre.

Le refus du Concile

Ancien archevêque de Dakar, Mgr Marcel Lefèbvre, dans son opposition à certaines réformes conciliaires, en particulier liturgiques, fonda son propre séminaire à Ecône, en Suisse, et ordonna des prêtres, même après avoir été "suspendu" par le Saint-Siège, ce qui lui interdisait l'exercice de ses fonctions épiscopales. Les quatre principales questions faisant difficulté pour Mgr Lefèbvre sont résumées par "Théo" sous les titres de la liberté religieuse, de l'oecuménisme, de la messe, et de l'autorité du pape dans l'Eglise et des évêques dans leurs diocèses. En particulier, estimant que cela signifiait mettre sur le même pied la vérité et l'erreur, Mgr Lefebvre n'a pas voté la déclaration de Vatican II sur la liberté religieuse.

Ecclesia "adflicta"

C'est le 30 juin 1988, après avoir rejeté - le lendemain de sa signature - le protocole signé le 5 mai au bout de longs pourparlers, ainsi qu'une ultime proposition du cardinal Ratzinger, de la part du pape, que Mgr Lefèbvre consacra quatre évêques. Cette désobéissance, considérée comme un "acte schismatique" entraînait son excommunication ipso facto et mettait la Fraternité Saint Pie X en dehors de l'Église catholique. C'est ce qui explique le titre du Motu proprio du 2 juillet 1988: "Ecclesia Dei adflicta": "affligée". Car si Mgr Lefebvre n'avait pas consacré d'évêque, les ordinations sacerdotales n'auraient pas continué après sa mort. Remarquons que les ordinations en question (sacerdotales et épiscopales) sont illicites - mais "valides" - du point de vue du droit canon, ce qui n'est pas sans créer de confusion chez les fidèles.

Fondation de la Fraternité Saint-Pierre

Pourtant, d'autres catholiques de sensibilité "traditionaliste" choisissaient alors l'unité, en particulier en rejoignant la Fraternité Saint-Pierre, qui est, depuis juin 2000, sous l'autorité de l'abbé Arnaud Devillers. En effet, dans son Motu proprio de 1988, le pape, qui constatait et déplorait le schisme, affirmait en même temps sa volonté de faciliter "la communion ecclésiale à ceux qui se sentent attachés à des formes liturgiques et disciplinaires antérieures de la tradition romaine, grâce à des mesures nécessaires pour garantir le respect de leurs justes aspirations". C'est dans cet esprit qu'était fondée la Fraternité Saint-Pierre, Société cléricale de vie apostolique, de droit pontifical. Un séminaire de formation était institué en Bavière. En France, des évêques ont confié à des prêtres de cette Fraternité la célébration de certaines messes selon de rite "de Saint Pie V", en vigueur avant Vatican II. Ces communautés relèvent de l'autorité de l'évêque diocésain.

A la faveur du pèlerinage jubilaire

Néanmoins, le dialogue avec la Fraternité Saint-Pie X s'est poursuivi, officieusement, pendant 12 ans. Aujourd'hui, certains observateurs n'hésitent pas à dire que la Fraternité Saint-Pie X a renoué visiblement le dialogue avec Rome, par le geste même de son pèlerinage jubilaire aux quatre basiliques majeures, les 8 et 9 août 2000. Et le 30 décembre, Mgr Bernard Fellay, supérieur de la Fraternité, s'est rendu à Rome et a rencontré le pape lors de sa messe privée du matin, mais aucune parole importante n'a été échangée.
Mgr Fellay a également rencontré plusieurs fois le cardinal Castrillon Hoyos, au cours du dernier trimestre 2000. Le 16 janvier dernier, il a cependant demandé des "garanties" à Rome pour avancer dans le dialogue auquel il met des conditions.
Dans ce contexte, on comprend que les nominations de ce samedi 24 février assureront aux éventuelles rencontres à venir une base élargie et des approches complémentaires.
Enfin, il semble, d'après des sources bien informées, que ces derniers développements correspondent à une vraie demande à l'intérieur de la Fraternité Saint-Pie X, où pourtant les sensibilités ne sont pas homogènes, avec d'une part ce que d'aucuns appellent des "irréductibles" - face à ce qui est considéré par eux comme la "dérive conciliaire" - et d'autre part ceux qui considèrent nécessaire un rapprochement avec le Successeur de Pierre.
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