13 octobre 2006

La reconnaissance d’un second rite est-elle un danger?
recueilli par Nicolas Senèze - La Croix - 13/10/2006
Mgr Robert Le Gall : « Ce biritualisme de fait ne sera pas facilement gérable » L’archevêque de Toulouse, président de la Commission de l’épiscopat pour la liturgie et la pastorale sacramentelle, membre de la Congrégation pour le culte divin à Rome, réagit aux projets de libéralisation du rite tridentin (lire La Croix du 12 octobre). Ce bénédictin plaide pour un apaisement après les remous post-conciliaires.

«Nous ne pouvons qu’adhérer au souhait du Saint-Père qui veut le retour des traditionalistes, en particulier de ceux qui sont rassemblés au sein de la Fraternité Saint-Pie-X. On ne peut que comprendre et accepter cette volonté de garder dans l’unité de l’Église tous les fidèles ! Mais il est vrai qu’au niveau français, cela pourra créer de graves difficultés, en particulier chez ceux qui sont demeurés fidèles à Vatican II et célèbrent selon le rite de Paul VI.
Jusqu’à présent, la célébration selon le rite de saint Pie V était possible dans le cadre d’un indult, c’est-à-dire d’une concession par rapport au droit courant de l’Église. Son éventuelle libéralisation telle que vous en avez fait état – mais je ne dispose pas de plus d’informations que ce qu’en a dit La Croix hier ! – en distinguant un rite latin « ordinaire » et un rite latin « extraordinaire », conserverait toutefois une nuance importante à mes yeux, puisque le mot « ordinaire » renverrait à ce qui se fait selon l’ordre, et « extraordinaire » à ce qui demeurerait une concession. Mais, même si cela peut faire perdre de leur impétuosité à ceux qui réclament cette possibilité, ce biritualisme de fait ne sera pas facilement gérable !
En France, où nous sommes souvent contestataires, la question liturgique demeure très idéologique, appuyée sur une histoire ancienne dont elle n’est que la partie émergée. Libéraliser ce « rite extraordinaire », même si son but est d’apaiser les esprits, risque donc d’exacerber les oppositions et aussi de décourager ceux qui travaillent généreusement en faveur de la liturgie. En France, nous avons fait un grand travail de formation en matière de liturgie. Et même s’il reste encore beaucoup à faire, nous n’en sommes plus aux errements des années 1970 ! Je pense que notre pays, plus que d’autres, a trouvé un équilibre en la matière.
C’est le message que je m’efforce de faire passer à Rome en soulignant ce que nous essayons de faire depuis plusieurs années. C’est aussi ce que montrera le colloque que nous organisons à la fin du mois, dans le cadre de l’Institut supérieur de liturgie, et auquel participera le cardinal Francis Arinze, préfet de la Congrégation pour le culte divin.»