21 février 2009





L'Argentine ne veut plus de l'évêque négationniste
21 février 2009 - Olivier Ubertalli - ouest-france.fr
Mgr Williamson, qui nie l'existence des chambres à gaz, a dix jours pour s'en aller. Le pays, longtemps considéré comme terre d'accueil de nazis, veut redorer son blason. Ses thèses négationnistes « heurtent profondément la société argentine, le peuple juif et l'humanité ». Les autorités argentines ont donné dix jours à Mgr Williamson, dont l'excommunication a été levée par le pape, pour quitter le pays. À Buenos Aires, qui abrite la troisième plus grande communauté juive au monde, les propos de l'évêque négationniste avaient provoqué un véritable tollé.
Pour déclarer Williamson persona non grata, le ministre de l'Intérieur argentin a trouvé une faille dans ses papiers d'immigration. L'évêque britannique aurait falsifié des documents afin de résider en Argentine. La vraie raison de cette mise à la porte semble ailleurs : il s'agit pour le pays de montrer qu'il a changé. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le mouvement péroniste, connu pour sa complaisance envers Mussolini et Hitler, avait permis l'exil argentin de centaines d'ex-nazis allemands ou fascistes italiens.
Conservatisme religieux
« Les courants conservateurs ont, aussi, été toujours influents au sein de l'Église argentine », noteJosé María Poirier, directeur du mensuel chrétien Criterio. Au fil du XXe siècle, le conservatisme religieux argentin s'est ainsi manifesté au travers du national-catholicisme de la puissante Opus Dei, de l'association catholique des avocats ou encore de l'Université catholique.
À partir des années 1970, Mgr Lefebvre, fondateur de la fraternité Saint-Pie X, a trouvé en Argentine de fervents soutiens, en particulier l'évêque Abelenda, qui avait défendu les thèses les plus traditionalistes, durant le Concile Vatican II. Quatrième communauté lefebvriste après la France, l'Allemagne et l'Amérique du Nord, l'Argentine abrite donc l'unique séminaire intégriste d'Amérique latine, avec vingt-cinq étudiants. Sept nouveaux sont attendus en mars. On y trouve vingt-deux paroisses lefebvristes répartis sur neuf provinces.
Mais aujourd'hui, les relations entre les lefébvristes et l'Église argentine sont tendues. Le père Christian Bouchacourt, supérieur du district d'Amérique du sud de la fraternité Saint-Pie X, a demandé une audience au cardinal Jorge Bergoglio, archevêque de Buenos Aires, afin de renouer le dialogue.
En attendant, sur le parvis de l'Eglise de La Reja, à 50 kilomètres de la capitale argentine, les fidèles de la fraternité intégriste défendent leur évêque négationniste. Pour Silvia, couverte par une mantille noire, la mise à l'écart de Mgr Williamson reste « une grande perte pour la communauté et arrange les affaires des progressistes du Vatican ». L'église lefebvriste ne désemplit pas. Environ 500 fidèles se pressent chaque dimanche pour suivre les deux messes en latin.
Olivier UBERTALLI