26 janvier 2014

[Père Jean,Capucin de Morgon] "J'ai demandé au Père Gardien si je pouvais vous prêcher aujourd'hui sur ce sujet..."

Père Jean,Capucin de Morgon - 26 janvier 2014

Sermon du Père Jean, OFMC,
du 3e Dimanche après l’Epiphanie (26 janv. 2014)

«Autant qu'il vous est possible, soyez en paix avec tout le monde. » Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ainsi soit-il. 

Mes chers amis, ce sermon commencera sur cette explication ou plutôt cette invocation de la parole de Dieu tirée non de l'Évangile du jour, mais de l'épître de Saint Paul aux Romains. « Autant qu'il vous soit possible, soyez en paix avec tout le monde. » Autant qu'il soit possible précise Saint Paul. Parce que cette nuit, dans notre office des matines à Morgon, nous avons lu une autre épître de Saint Paul, celle des Galates. Nous avons commencé, pendant cette semaine, nous lirons les matines au milieu de la nuit toute l'épître des Galates. Et au premier chapitre de l'épître des Galates, Saint Paul dit : « si quelqu'un n'a pas le même Évangile qu'il soit anathème ! » Ce n'est plus le même langage. Là, c'est plus possible d'être en paix avec quelqu'un qui a une autre doctrine, un autre évangile. 

Alors, permettez-moi donc de partir sur cette parole de Dieu pour essayer de faire l'application à la situation actuelle, aujourd'hui. Quand nous prêchons, nous devons avoir le souci à la fois de vous expliquer la parole de Dieu, la volonté de Dieu, la vérité et puis aussi, eh bien, de l'appliquer au besoin présent, au besoin de vos âmes. Et la plupart d'entre vous, je pense, êtes au courant que depuis quelques semaines, eh bien, il y a de graves événements qui secouent notre monde de la Tradition. Pour ceux qui ne seraient pas trop au courant, je résume très vite. Un certain nombre de prêtres ont quitté la Fraternité et aussi des communautés amies, donc, ont pris leur distance par rapport aux autorités de la Fraternité. Alors vous êtes en droit de vous poser : Et vous Morgon, qu'est-ce que vous faites ? Qu'est-ce que vous pensez de cela ? 

J'ai demandé au Père Gardien si je pouvais vous prêcher aujourd'hui sur ce sujet. Non pas de prendre parti pour l'un ou pour l'autre, encore une fois, « autant qu'il vous soit possible soyez en paix avec tout le monde». Samedi-dimanche derniers j'étais avec le père Fidèle-Marie à Avignon, dans un centre de messe de la Fraternité, et nous avons fait du bon ministère, nous avons beaucoup prêché, confessé et ça c'est très bien passé. Et dans quelques semaines, je dois aller à Avrillé prêcher ou plutôt faire une séance de sessions de théologie mariale pendant une semaine aux pères d'Avrillé. «Autant qu'il vous est possible, soyez en paix avec tout le monde. » Voilà. 

Mais, donc, j'ai demandé au Père Gardien, et il m'a donné son accord, bien sûr, eh bien, de vous expliquer pourquoi il y a cette division. Je crois que c'est ça le plus important à comprendre. Parce que cette division, visible, sensible, douloureuse même d'une certaine manière, en fait c'est quelque chose qui nous est apparent, visible. Elle est le résultat d'une division beaucoup plus profonde, plus grave sur laquelle je voudrais vous parler : c'est une division sur les principes. C'est très important, mes bien chers fidèles, que vous compreniez cela. Ce n'est pas une question de personnes, c'est une question de principes. Si vous avez seulement retenu cela en sortant de cette église, je pense avoir rempli ma mission. C'est ce que j'ai expliqué au Père Gardien, ce que je compte essayer de vous faire comprendre. Et vous avez à la sortie de la messe des photocopies d'un texte que j'avais fait, déjà, il y a quelque temps, et donc il n'est pas signé, mais je l'assume, c'est moi qui l'ai rédigé. Le Père Gardien m'a permis de vous le donner pour vous donner ce que je ne peux pas vous dire dans un sermon. Ce sermon risque d'être un peu plus long, déjà, que d'habitude et je ne peux pas entrer dans tous les détails. Vous avez ce texte, vous pouvez le prendre. Il y a en tout une cinquantaine de photocopies, je pense qu'il y en a assez pour tout le monde. Et vous pouvez photocopier, diffuser si vous voulez, j'en assume la responsabilité.

Le plan de ce sermon, si c'est un sermon, va être assez simple. Je vais d'abord vous montrer qu'il est très important que nous soyons des hommes de principes. La deuxième partie, je vais essayer de vous expliquer que, si nous sommes depuis une cinquantaine d'années, dans notre résistance, dans notre combat de la foi, de la Tradition, c'est parce que nous sommes des hommes de principes et nos pionniers ont été des hommes de principes. Et troisièmement, je vais essayer d'appliquer la situation actuellement. Aujourd'hui, le problème est un problème de principes actuellement dans la Tradition. 

Alors, premier point, nous devons être des hommes de principes. Je vais me baser sur l'enseignement des papes. Vous avez le pape Pie IX en 1871 qui a reçu des Français à Rome. Et il leur a dit : « En France depuis la révolution, ce qui empêche que vous ayez la bénédiction de Dieu sur votre pays, c'est parce que vous avez altéré les principes.» Voilà ce qu'a dit le pape Pie IX. Vous avez altéré les principes. Ensuite, le pape saint Pie X dans son encyclique Pascendi, nous dit, et il ne fait que répéter Saint Thomas d'Aquin, c'est donc la doctrine de l'Église, la pure doctrine traditionnelle de l'Église. Le pape saint Pie X nous dit : « quand on altère, quand on dévie un tant soit peu d'un principe, les conséquences sont énormes ! » C'est un peu comme le tir au fusil. Si vous déplacez d'un petit millimètre, à deux cents mètres, vous êtes à un mètre de la cible. Ensuite le pape Pie XII, recevant aussi des Français. Nous sommes plus proches. Le pape Pie XII leur a dit : «La France ne se relèvera que quand les catholiques seront des hommes de principes, des hommes de doctrine, des hommes formés.» Voilà comment le pape Pie XII parlait à la veille du concile à des catholiques français : « Il faut que vous soyez des hommes de principes.» J'arrête-là les citations des papes parce que je voudrais citer aussi ces grands évêques que fut un cardinal Pie qui a fait tout un sermon pour expliquer à ses diocésains : l'Église a toujours été intransigeante sur les principes et tolérante dans la pratique, avec les personnes. Et le monde, les libéraux, c'est le contraire. Ils sont très tolérants sur les principes: Pensez ce que vous voulez, vous avez le droit de penser ce que vous voulez. Et ils sont intolérants en pratique. Voilà ce qu'explique le cardinal Pie. Et Mgr Freppel dit : «quand nous abandonnons les principes, c'est la ruine.» Et ces évêques, ces grands évêques qui ont vécu le siècle qui a suivi la révolution, nous disent, et c'est vrai, que toutes les révolutions ne sont pas faites par des personnes, ce sont des batailles de principes. Et c'est vrai et nous allons avoir tout à l'heure l'explication pour le deuxième point. Donc, retenons bien, mes bien chers frères : nous devons être des hommes de principes. Les papes nous le disent, l'Église nous le dit. Si nous sommes des hommes d'intérêt, si nous faisons plier les principes qui sont au-dessus de nous, pour nos intérêts, nous allons à la catastrophe, nous ne faisons pas la volonté de Dieu. Les principes ne sont pas des dogmes de foi, forcément, mais si on ne les respecte pas, eh bien, ils se vengent. C'est un principe dans n'importe quel pays, en Angleterre comme en France, qu'on doit tous conduire dans le même sens sur les routes, même si en Angleterre on conduit à gauche et nous à droite. Mais le principe est le même. Et si vous ne voulez pas respecter ce principe, eh bien, vous allez à la catastrophe. Pas besoin de vous faire un dessin. C'est un ordre de nature. Ce n’est pas un dogme de Foi. Ce n'est pas écrit dans les conciles, mais c'est un principe. Si on ne le respecte pas ce principe, on va à la catastrophe, à l'accident.

Alors, maintenant, deuxième point, je voudrais vous montrer que dans la Tradition, dans notre résistance que nous faisons, malgré nous, de mauvais cœur d'une certaine manière, à la hiérarchie en place au pape, aux évêques, c'est parce que c'est une question de principes. Nous ne sommes pas contre le pape, nous ne sommes pas contre les évêques. Au contraire, on prie pour eux. Mais nous sommes contre leurs faux principes. Oui. Et je donne un exemple que vous comprendrez tout de suite. Le concile Vatican I avait posé un principe: « Tout est ordonné ici-bas à la gloire de Dieu.» Un principe, c'est même dogmatique, c'est dans la Sainte Écriture. Vatican I n'a rien inventé en déclarant ça. Il n'y avait pas de concile qui l'avait dit avant Vatican I. Vatican I n'a fait que rappeler un principe qui est inéluctable : tout ici-bas a été créé par Dieu pour sa gloire. Vatican II a posé un autre principe: « Tout ici-bas est ordonné à l'homme.» C'est en toute lettre dans Vatican II. On a posé un autre principe. Et nos anciens, un Mgr Lefebvre, un père Calmel, un père Eugène, n'ont pas accepté ce nouveau principe. Et vous bien chers fidèles, les anciens surtout parmi vous, je m'adresse, vous n'avez pas accepté aussi, vous, dans la pratique parce que la nouvelle religion qui ordonne à l'homme, eh bien, elle a retourné l'autel. Et vous avez été surpris un jour en arrivant dans votre église de voir que l'autel était dans l'autre sens. Vous vous êtes dit : mais le sacrifice, il est offert à Dieu, ce n'est pas un bon repas entre nous. Votre bon sens, et même votre sens catholique, a, sans connaître le principe, l'a tout de suite vu. Et s'il m'est permis de parler de ma famille, j'ai de très bons souvenirs, c'était à la fin du concile, mon père ne voulait plus aller à la messe de la paroisse parce qu'on avait retourné l'autel dans l'autre sens. Il allait à une paroisse plus loin où il y avait le vieux doyen qui célébrait la messe comme toujours. Et on pourrait continuer comme ça. Nos anciens, les pionniers, ceux grâce à qui nous avons fait le bon combat de la foi, nous avons eu la grâce de continuer, grâce à mon père, grâce à Mgr Lefebvre, s'ils n'avaient pas existé, on ne serait pas là. Et ce furent des hommes de principes. Ils n'ont pas voulu transiger. Mgr Lefebvre, vous le savez bien, je crois, on a cherché à tout prix à lui faire célébrer au moins une fois dans sa vie la nouvelle messe. Il était Flavigny, un père jésuite qui a été envoyé de Rome avec un missel de Paul VI sous le bras, et il suppliait Monseigneur : 
« - Mais concélébrons la messe une fois, Monseigneur, une fois. » 
Monseigneur Lefebvre était un homme de principes : 
«- Non, si cette messe est mauvaise, je ne veux pas la célébrer, même pas une seule fois.» 
Malgré ce bon jésuite envoyé de Rome par le pape Paul VI en personne et les papiers qu'il fallait, qui le suppliait presque à genoux de concélébrer avec lui. Il aurait pu dire, Monseigneur Lefebvre non comme un homme qui n’était plus un homme de principes, mais un homme d'intérêt : Oh, ça va arranger les choses, ils vont être plus gentils. Allez une fois. Personne ne va le voir. Dans une petite chapelle, à l'oratoire Lacordaire là. Et puis c'est tout, et puis ça va arranger les choses. Autre exemple qui me vient à l'esprit. Je ne me rappelle plus le nom de ce pape, mais quand le roi d'Angleterre voulu divorcer pour se remarier, le pape lui a dit:
« - Mais non ce n'est pas possible. Vous ne pouvez pas divorcer.
- Si vous ne faites pas ça, moi, je quitte l'Église romaine.
- Non, non. Ce n'est pas possible, je n'ai pas le droit et je ne peux pas. C'est un principe qui est au-dessus de moi. Vous êtes marié, vous êtes marié et je ne peux pas, vous avez eu un mariage devant Dieu, vous êtes marié. »
Et résultat, le roi d'Angleterre s'est séparé, et on a ce schisme, voyez. On pourrait dire : eh bien le pape quand même s'il avait dit oui, cela aurait arrangé les choses et puis l'Angleterre serait restée catholique. C'aurait été bien mieux etc. Non ! C'est un faux calcul. C'est un calcul d'intérêt. Voilà, c'est comme ça. On respecte les principes. C'est dans la sainte Écriture. Saint Paul le dit. On n’a pas le droit de faire un mal pour en espérer un bien. On n’a pas le droit de trahir un principe voulu de Dieu pour un intérêt passager ou particulier qui va contre le bien commun. Et on pourrait continuer d'autres exemples, mais bien chers frères, je ne voudrais pas trop continuer sur ce deuxième point, mais je le résume si vous le voulez. Nos anciens ont été fidèles à leurs principes et c'est grâce à eux qu'on est là, qu'on a fait le bon combat.

Or maintenant, troisième point, l'application aujourd'hui. Aujourd'hui, ce dimanche, là, fin janvier. Eh bien, ce qui se passe, et je voudrais le dire encore en toute paix, voyez sans acrimonie, sans zèle amer, mais pour vous faire comprendre où se situe le problème, où se situe la division. Elle est dans les esprits. Elle n'est pas une question de prêtres ou de communautés qui ne sont plus avec nous, qui sont en dehors etc. La division est dans les esprits dans notre monde de la Tradition. Voilà. Dans les prieurés, dans les couvents. Oui, elle est dans les esprits c''est-à-dire qu'il y a des esprits qui professent un principe qu'on a tenu depuis des années et des années, que Mgr Lefevre nous a légué, voilà. Et puis il y en a d'autres qui n'admettent plus ce principe, qui disent que ce principe ne vaut plus, il n'est pas bon. C'est là le problème. Alors, quel est ce principe, je pense que la plupart d'entre vous l'ont compris. C'est le principe que l’on ne peut pas signer un accord pratique ou canonique avec les autorités romaines si on n’est pas d'accord, avant, sur la doctrine, si nous ne professons pas les mêmes vérités. Et ça, c'est un principe catholique, et vous avez la photocopie à la sortie. Vous pourrez lire paisiblement chez vous, bien lire l'argumentation que j'ai voulu mettre pour montrer que c'est fondé sur la Sainte Écriture, que c'est fondé sur les Pères de l'Église, que c'est fondé sur la pratique de l'Église. La pratique de l'Église, j'insiste là- dessus, c'est l'attitude des papes jusqu'à Pie XII face par exemple aux orthodoxes. Quand les orthodoxes depuis le Grand Schisme, depuis le IX siècle avec Photius, eh bien, cherchaient à discuter avec Rome pour à nouveau pour se réunir, pour faire un accord pratique, canonique, être réunis à la hiérarchie romaine, eh bien, cela a toujours buté sur des questions de doctrine. Toujours : la primauté du pape, en particulier, et le Filioque dans le Credo. Et quand il y a eu des accords, ce qu'on appelle les uniates par exemple en Grèce, en Russie, il y a eu certaines communautés orthodoxes qui se sont réunies à l’Eglise romaine, qui sont redevenues catholiques, eh bien, Rome n'a jamais transigé sur la doctrine. Jamais. Par contre sur la pratique, la liturgie, pas de problème. Sur le mariage de vos prêtres, pas de problème. C'est traditionnel chez vous, ça toujours été. Aucun problème. Un petit exemple : avec les uniates d'Ukraine, les Ruthènes, c'était au XVIIe siècle, eh bien, Rome disait : il faut que vous acceptiez la doctrine du Filioque. C'est-à-dire que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Que vous ne disiez plus que c'est une hérésie. Et les uniates, enfin ceux qui allaient être uniates, on dit d'accord. On accepte cette doctrine : effectivement, on a réétudié la question, on a vu que c'était conforme à la tradition, c'était ce que l'Église a toujours enseigné, et nous sommes d'accord avec le Filioque. Et à ce moment-là, Rome a dit : on n'exige pas que vous le chantiez dans votre Credo parce que vous ne l'avez jamais chanté dans le Credo même dans les premiers siècles. Voyez, Rome leur a dit : nous n’exigeons pas « chantez-le dans le Credo». Elle a dit : simplement vous nous dites que vous êtes d'accord sur ce point de doctrine. Et on vous laisse, vous ne le chantez pas dans le Credo. Et d'ailleurs, la petite histoire, un siècle après, ils ont demandé à le chanter dans le Credo. Voyez, la fermeté de Rome sur un point de doctrine. La doctrine d'abord, il faut que l'on soit d'accord sur la doctrine et après, des questions pratiques, des questions liturgiques, pas de problème, ça s'arrangera, mais la foi on ne transige pas. Là on est intolérant. Tout à fait et on est fier de l'être. C'est la foi, ça ne nous appartient pas. C'est un dépôt qu'on a reçu, c'est au-dessus de nous. On n’a pas le droit d'y toucher, même si on est pape. 

Alors, notre problème actuel. Pendant des années Mgr Lefebvre jusqu'aux sacres a cherché à discuter avec Rome. Voilà. Depuis 75, l'année de la condamnation injuste et nulle de Rome de la Fraternité Saint-Pie-X, jusqu'en 88. Mgr Lefebvre, quand on l'appelait à Rome, il y allait toujours, et il discutait de foi, de doctrine d'abord. Et puis, il essayait au niveau pratique. Est-ce qu'il y a un moyen de s'arranger etc. Ce qui fait qu'il y avait toujours cet aspect doctrine et pratique qui jouait. Alors, des fois, Mgr Lefebvre avait des déclarations plutôt dans le sens pratique en disant laissez-nous faire l'expérience de la Tradition, voilà, et puis, demandez seulement cela, faites-nous l'expérience de la Tradition. Et puis, on s'arrangera comme ça. Parce que c'était un homme d'Église, il voulait toujours, il avait cette volonté bien sûr d'être en communion autant que possible, voilà, avec la hiérarchie, avec l'Église. Et puis, il s'est rendu compte qu'il a été trop loin, il l'a dit, il l'a reconnu. «J'ai été trop loin». Le 5 mai quand il a signé le protocole. Il a été trop loin parce qu'il a transigé sur la question de la doctrine. Il a fait passer la pratique avant. Il l'a reconnu, il le déclare dans le Fideliter n° 66. Ceux qui l'ont chez vous peuvent le lire. Et dans ce Fideliter 66 qui date de décembre 88 sur la couverture il est écrit: « À une reprise des colloques, je poserai mes conditions.» Voilà ce que Mgr Lefebvre a dit après les sacres et qu'il a toujours tenu jusqu'à la mort et ce qu'il nous a légué.
Quelles sont ces conditions ? Vous pouvez les lire dans Fidéliter n°66 et vous les connaissez. « Je viendrai à Rome avec les encycliques des papes et je leur dirai: êtes-vous d'accord avec ces encycliques ? Quas Primas sur la royauté de Notre-Seigneur Jésus-Christ? Mortalium Animos sur le faux oecuménisme ? etc. etc. etc. Est-ce que vous êtes d'accord sur la doctrine de vos prédécesseurs ? » Et deuxième chose très importante qu'ajoute Mgr Lefebvre dans ses conditions, deuxième condition : «Êtes-vous prêts à réformer Vatican II sur ces encycliques ? » Parce que Vatican II dit le contraire de Mortalium Animos et dit le contraire de Quas Primas et d'autres, par exemple, encycliques sur le libéralisme de Grégoire XVI. « Est-ce que vous êtes d'accord non seulement sur la doctrine de vos prédécesseurs, mais aussi de changer, de faire revenir Vatican II aux bons principes.» Voilà les conditions que donne Mgr Lefebvre. Je n'invente rien. Lisez Fidéliter 66, lisez-le attentivement. Vous pouvez vous le procurez. On peut vous donner des photocopies si vous voulez. Et dans d'autres déclarations, Mgr Lefebvre à Flavigny par exemple, on vous a donné des extraits de cette déclaration : « À Rome ils l'ont découronné Notre-Seigneur Jésus-Christ, on ne peut pas s'entendre avant qu'il l'ait recouronné.» Avant qu'ils disent à nouveau que Notre-Seigneur doit régner sur la société. Alors retenons, mes bien chers frères, Mgr Lefebvre après les sacres jusqu'à sa mort a toujours tenu fermement sur ce principe. « Je poserai mes conditions : la doctrine, les encycliques des papes. Est-ce que vous êtes d'accord oui ou non ? Si vous n'êtes pas d'accord, inutile de dialoguer.» C'est écrit dans le Fidéliter 66 : inutile de discuter. Inutile. On n’est pas d'accord sur la doctrine, inutile de parler plus loin sur des questions pratiques. Voilà ce que Mgr Lefebvre nous a légué jusqu'à sa mort. Et notre mouvement de la Tradition a toujours été parfaitement uni tant qu'on a tenu ce principe. Pendant des années et des années, ce principe a été tenu. Et vous lirez sur la photocopie que vous avez à la sortie de la messe des déclarations de cinq évêques, Mgr Lefebvre et les quatre autres qu'il a sacrés, qui défendent ce principe. Clair et net. Mgr Fellay, en 2008, dans une Lettre aux amis que vous pouvez retrouver dans vos vieux papiers, octobre 2008, Lettre aux amis et bienfaiteurs qui est jointe à celle du district de France, il le dit en toute lettre, il dit ce principe est d'un ordre de nature. C'est comme la conduite sur la route. Voilà, c'est comme ça, ça s'impose à nous. C'est un ordre de nature. Il faut d'abord être d'accord sur la doctrine avant de pouvoir passer à des arrangements pratiques. 

Et malheureusement, depuis quelque temps, qu'on peut situer après la fin des discutions romaines, c'est-à-dire l'automne 2011, eh bien petit à petit, nous voyons, nous sommes obligés de constater que les autorités de la Fraternité abandonnent ce principe. Je le dit sans acrimonie. Je le dit sans zèle amer. Je le dit paisiblement. Je suis prêt à assumer ce que je dis et elles ne peuvent pas le contester parce que c'est public. Cela a commencé d’abord avec Mgr Fellay qui disait que ce principe, il peut y avoir exception. Il a fait une conférence au Canada en disant : par exemple avec les orthodoxes, on faisait des discussions, on faisait des arrangements sur la question du mariage etc. Le divorce dans certains cas. Mgr Fellay a dit : ce principe ne vaut pas, il y a des exceptions, on peut transiger avec. Mais quand on regarde bien ces questions du mariage avec les orthodoxes, ce n'est pas une question de foi ! C'est une question de discipline. Tout à fait différent. Ensuite Mgr de Galarreta, dans sa conférence qu'il a faite le 13 octobre 2012 à Villepreux où il dit : Bon. Ces questions de pratique, doctrine on met tout ça ensemble, et puis l'important, si on peut faire un accord, après nous continuerons le bon combat à l'intérieur, nous serons le fer de lance à l'intérieur, voilà on les combattra de l'intérieur. Et puis assez récemment Mgr Tissier de Mallerais, dans une conférence qu'il a faite à Toulon en juin, voilà, il a dit, et il m'a confirmé par écrit, j'ai eu une échange de lettre avec lui, que Mgr Lefebvre a toujours cherché un accord pratique. Et je lui ai écrit en lui disant : avant les sacres c'est vrai, il y a eu des paroles, des citations de Mgr Lefebvre qui montrent que des fois il était moins ferme sur ce principe. Mais après les sacres, il a toujours été bien clair et je lui rappelle, à Mgr Tissier dans cette lettre, que dans le Fideliter 66, Mgr Lefebvre dit : «Je poserai mes conditions etc.» Réponse de Mgr Tissier de Mallerais, personnelle, j'ai la lettre datée du 11 septembre 2013 : « Il l'a dit, mais il ne l'aurait pas fait. » 

Alors, je dis ça, encore une fois je ne suis contre personne : je ne suis pas contre Mgr Fellay, je ne suis pas contre Mgr de Galarreta, je ne suis pas contre Mgr Tissier. Je prie pour eux. Voilà, ce sont des évêques et l'un d'entre eux m'a donné les ordres et encore une fois, autant que possible, je voudrais être en paix avec tout le monde. Mais ce que je vous dis sont des choses publiques, ils ont parlé publiquement : au Canada, à Villepreux et à Toulon. C'est connu. Je ne dis pas des choses cachées. Je cherche à vous faire comprendre le problème en ce moment. Il y a une division dans les esprits. Ce principe qui a été tenu pendant des années, auquel nous étions tous groupés derrière ce principe, eh bien maintenant est abandonné. 

En 2006, la Fraternité a fait un chapitre général où elle réaffirmait solennellement ce principe. Et en 2012, elle l'a abandonné. Elle a posé six conditions, si vous êtes d'accord sur les six conditions, à ce moment-là, accord canonique, accord pratique. Et Mgr Fellay écrivant au pape Benoît XVI en juin 2012, lui dit : voilà maintenant la voie qu'on a choisie, on laisse de côté les problèmes doctrinaux qui ne sont pas encore résolus suite aux discussions, d'abord un accord pratique et ensuite on verra les accords doctrinaux. Voilà. Et Mgr Fellay dit dans sa lettre à Benoît XVI : « J'ai l'intention, vraiment, de continuer sur cette voie.» Il le précise, il le dit très bien, c'est son intention. Et en juillet, un mois après, le 2 juillet, il y a une réunion des supérieurs religieux à Paris avec deux évêques, Mgr Fellay et Mgr de Galarreta. Et un Père Dominicain s'est levé en disant : mais Mgr, parce que Mgr Fellay avait avoué qu'il regrettait certaines choses etc., alors le Père Dominicain s'est levé : mais Monseigneur est-ce qu'il ne faut pas revenir au principe du chapitre de 2006. Voilà. Et Mgr Fellay a dit : Non, non. Non, non. Ce principe non, non, il n'est pas clair, il n'est pas sûr. Alors que quatre ans auparavant, il affirmait : c'est un ordre de nature. C'est-à-dire quelque chose qu'on ne peut pas toucher. Il n'y a pas d'exception possible à un ordre de nature. C'est philosophique, c'est comme ça. C'est la nature. 

Donc vous voyez, mes bien chers frères, où se situe le problème. C'est ça que j'ai voulu, essayé de vous faire comprendre sans chercher à prendre parti, sans chercher à attaquer les personnes même si j'ai donné des noms. Mais je vous ai dit des choses qui sont publiques. Maintenant, je vous laisse prier, je vous laisse réfléchir sur ces choses-là pour que chacun d'entre nous, en conscience, nous puissions dire : quelle est la volonté de Dieu dans cette affaire ? C'est ça le plus important. Quelle est la volonté de Dieu dans cette affaire ? Et pas taper sur les uns et sur les autres en disant: ils ont tort etc. On n'en veut plus. Anathème à ces prêtres d'un côté ou de l'autre. Autant que possible, restons en paix, là, soyons en paix avec tout le monde. Autant que possible, et là c'est encore possible. Parce qu'il n'y a pas encore de ralliement officiel. On en est encore qu'à une bataille de principes. Et elle est très importante, elle est primordiale. C'est pour ça que vous avez ces photocopies à la sortie que je vous invite à lire, à comprendre. Toutes les révolutions se sont jouées sur des principes. Nos anciens nous l'ont dit, il faut nous inculquer ça dans notre esprit. Et cette question de principes, il faut vraiment l'avoir compris, et ensuite, eh bien, nous devons suivre nos consciences parce qu’à chacun d'entre nous prêtres pour nous c'est un très grave problème de conscience. Et Mgr de Galarreta l'avait dit au chapitre de 2011, du 7 octobre 2011 à Albano, il avait dit: «Si on abandonne ce principe, il va y avoir un grave problème de conscience pour nos prêtres.» Il l'a dit, en chapitre. Il avait averti. Et malheureusement c'est ce que nous voyons actuellement. Ces « départs », entre guillemets, c'est parce que c'est des prêtres qui ont un grave problème de conscience et ils ne sont pas les seuls, moi aussi. Qu'est-ce que je dois faire en ce moment ? Qu'est-ce que je dois faire en ce moment ? Alors prions bien, on nous invite à beaucoup prier en ce moment. Je pense que ça fait partie, voyez, certainement, de nos intentions de prières, eh bien, que nous soyons fidèles à ce que nous ont légué les anciens. Ces principes qui sont, j'en suis convaincu, qui viennent de Dieu, qui sont de la volonté de Dieu dans la crise actuelle, voilà dans nos rapports avec Rome. La condamnation du livre de M. l'abbé Pivert, c'est pour ça. C'est parce qu'il défend l'ancien principe. Il ne faut pas chercher ailleurs. Pourquoi le livre de M. l'abbé Pivert est défendu de vente maintenant dans les prieurés ? Nous le vendons toujours à Morgon. Eh bien parce qu'il défend le principe qu'on a toujours tenu depuis 25 ans et qui maintenant est abandonné. C'est ça. Donc vous comprenez bien, si vous avez compris cela, vous comprendrez beaucoup de choses concrètes, pratiques.

Alors mes bien chers frères, j'espère bien vous avoir parlé selon Dieu. J'espère ne causer de trouble en aucune âme, je voudrais au contraire que ce soit la paix. Je pense comme nous sommes sûrs, convaincus de la volonté de Dieu, nous ne pouvons être que dans la paix, même si on est dans les pires situations. Pensons à la sainte Vierge au pied de la croix, Stabat Mater. Elle était paisible. Stabat, elle se tenait debout. Elle n'était pas révoltée, elle n'était pas tremblante. Elle n'était pas paniquée. Voyez et pourtant, son Fils était dans une torture extraordinaire. Un cœur de mère et un cœur immaculé. Qu'est-ce qu'elle a dû souffrir ! Elle était dans la paix. Donc nous souffrons tous, mes bien chers frères certainement de cette situation. Tous ! Dans la Tradition. Mais demandons bien à la très Sainte Vierge, voyez, comme elle au pied de la croix de rester paisible et puis de garder les yeux sur Dieu, sur la Volonté de Dieu. Pourquoi était-elle paisible ? Parce qu'elle savait que c'était la volonté de Dieu que son Fils meurt dans ces conditions et ça suffisait pour qu'elle soit paisible. Demandons bien cette grâce à Notre-Dame et, autant que possible, restons bien en paix avec tout le monde. Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ainsi soit-il.