7 juillet 2015

[Abbé Philippe Jouachim - FSSP Nantes] De retour de Versailles

SOURCE - Abbé Philippe Jouachim - FSSP Nantes - 7 juillet 2015

Bien chers amis, on sait que l’illustration et l’image d’un ordinand et les mots qui y sont inscrits ont un sens bien particulier. Ils nous permettent souvent de mieux comprendre une partie de la spiritualité du nouveau prêtre : une ligne directrice de son futur apostolat, en quelque sorte.
En ce qui concerne l’abbé Coiffet, qui vient hélas de nous quitter suite à une longue maladie, il est bon de nous rappeler que l’image de son ordination représentait Notre Seigneur et la Samaritaine avec cette phrase, tirée précisément du même épisode relaté par saint Jean : « Si scires donum Dei » : « Si tu savais le don de Dieu ».

Paroles magnifiques ! Car en s’adressant de la sorte à cette femme pécheresse devant le puits de Jacob, le Christ lui permit d’ouvrir peu à peu son cœur au message du Salut. Mais surtout, par cette manière de procéder, à la fois très délicate et très habile, on comprend aussi à quel point le Fils de Dieu avait la passion des âmes.

Alors que, marqués par le deuil, nous avons dans notre mémoire tant de souvenirs qui se bousculent dans nos esprits, nous pouvons nous aussi affirmer, nous qui l’avons connu et aimé, que l’abbé Coiffet avait, lui aussi, cette qualité éminemment sacerdotale : la passion des âmes.

Ce mardi matin, dans la cathédrale de Versailles, archi-comble, étaient réunis sa famille, bon nombre de prêtres et de séminaristes, mais aussi ses amis de toujours : ceux de Saint Martin de Bréthencourt, de Versailles, de Nantes, de l’Espérance, de Bordeaux, de Notre-Dame de Chrétienté, sans oublier les unités scoutes qui représentaient tant pour lui, alors qu’il se trouve maintenant, nous l’espérons tous, dans « ce camp de repos et de joie », comme le dit la prière des chefs.

Ce matin, dans ce sanctuaire irradié par un beau soleil d’été, un sentiment commun nous réunissait tous, je pense : celui de lui devoir quelque chose. Dieu seul connaît exactement la dette dont nous lui sommes redevables : un bon conseil, une confession ayant opérée un tournant dans une vie, un encouragement, un mot de réconfort, ou tout simplement cette ambiance chaleureuse et joyeuse qu’il savait spontanément créer autour de lui, avec ce caractère si particulier où l’on retrouvait tour à tour Jean Gabin, Lino Ventura et le Capitaine Haddock…

L’abbé Coiffet, c’était la passion des âmes. C’était aussi une voix, cette voix rauque qui faisait vibrer les haut-parleurs du Pèlerinage de Chartres ou de nos chapelles. Cette voix qui, spontanément, suscitait l’attention de l’auditeur, tant le langage était clair et la pensée profonde.

C’était également, chacun a pu en faire l'expérience, un tempérament enthousiaste, une joie communicative. C'était enfin une profonde humilité, manifestée non seulement par l’obéissance indéfectible envers ses supérieurs, mais aussi par sa patience pendant ces neuf mois de maladie implacable.

L’abbé m’avait confié, avant de partir pour la Bretagne dans sa dernière affectation, qu’il souhaitait se reposer et surtout établir une relation plus intime avec le Bon Dieu. Quelques semaines après, il était hospitalisé et le Seigneur, exauçant son désir, et pour des raisons que Lui seul connaît, a voulu l’unir plus particulièrement au mystère de la Passion. « Si quelqu'un veut venir à moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive » (Mt 16,24)

Ne cherchons pas à sonder les desseins du Seigneur puisque, l’abbé nous le disait souvent, ses voies ne sont pas nos voies. Gageons seulement que cette épreuve a certainement produit des fruits dont la splendeur nous émerveillera au Ciel.

Chacun, selon son degré d’amitié avec l’abbé Coiffet, conservera des souvenirs personnels. Pour ma part, je me rappelle encore ce camp de pâques avec les scouts du Chesnay où, pour lutter contre le froid, nous tournions en voiture autour du village en écoutant en boucle le premier chœur de la Passion selon saint Jean de Bach...

Quant à notre souvenir commun, ce sera sans aucun doute cette âme de prêtre, ce cœur bouillonnant de prêtre qui s’est battu pour le Sacerdoce, pour la Messe et pour maintenir contre vents et marées l’unité avec le Saint-Siège, cum Petro et sub Petro. La Fraternité Saint-Pierre n’est pas son œuvre, puisqu’elle a eu plusieurs fondateurs. En revanche, elle porte son empreinte, et tout porte à croire qu’elle la conservera toujours.

Je retiendrai personnellement cette image particulièrement belle : celle du cercueil de l’abbé traversant la nef de la cathédrale de Versailles, au chant du « Chez nous, soyez Reine », porté par des séminaristes. Quel symbole ! Jamais le mot « relève » n’a eu de plus beau sens.

Et peut-être, dans l’assemblée ou dans les écoles, les paroisses ou les unités scoutes qui ont connu l’abbé Coiffet, certains jeunes gens entendront eux aussi l’appel du Seigneur pour aller dire aux âmes, avec la même passion et la même foi vibrante «Si scires donum Dei»!

Merci pour tout, l’abbé, et désormais aidez-nous à accomplir notre mission sur la terre comme vous avez accompli la vôtre!

Abbé Philippe Jouachim